Anéantissement de la VIIe Armée allemande


CARROUGES et environs

Anéantissement de la VIIème Armée Allemande 

Dimanche 13 – Dimanche 20 août 1944

 

 

 

 

 

Face à 3 Panzer Division :

– la 9éme, occupant la forêt d’Ecouves,

– la 116ème, dans le secteur Ecouché, Argnetan, Sées,

– la 2ème, à l’ouest dans le secteur Carrouges, Ciral

 

CARROUGES, 13 AOÛT 1944 

 

Dès les premières heures du 13 août, le Groupement Dio s’est mis en route vers Carrouges, éventuelle étape en direction d’Ecouché et d’Argentan. Ces deux villes de la vallée de l’Orne tiennent la RN 24 bis et permettent le repli de l’ennemi en fuite. Le colonel Dio ne se préoccupe pas de ses voisins de gauche, la 3e DB US qui, venant du sud, devrait atteindre Pré-en-Pail ; ses deux sous-groupements rencontrent l’Allemand dès le départ, à hauteur de Gandelain. Les chars du 12e cuirassiers manœuvrent et prennent à revers la résistance qui bloque les fantassins du RMT ; près de 200 prisonniers sont faits. Dans Cirai, un peu plus loin, c’est tout un bataillon de la Wehrmacht qui fait face pendant plusieurs heures.

Impatient, le colonel Dio contourne le village avec un peloton de Sherman et caracole vers Carrouges au milieu de troupes ennemies refluant vers le nord. Les blindés causent de très lourdes pertes aux fuyards surpris, semant une confusion extrême, atteignent Carrouges et, faisant demi-tour, renouvellent leurs destructions. Un peu plus tard, le travail est achevé par le reste du sous-groupement conduit par le commandant Rouvillois.

Carrouges prise, rapidement nettoyée par l’infanterie, les chars atteignent le Ménil-Scelleur, 6 km plus loin sur la D 2.

Ils engagent de nouveau l’ennemi plus à l’est, aux lisières du bois de Goult qui prolonge jusque-là la forêt d’Ecouves. De nombreux véhicules ennemis sont détruits ainsi que le PC de la 2e panzer. Plusieurs accrochages affaiblissent l’ennemi au nord et à l’est de Carrouges, en particulier près de Chahains où parviennent les avant-gardes du groupement de Langlade.

En fin d’après-midi, le colonel Dio fait ses comptes et les transmet avec satisfaction au PC de la Division : pour la journée, plus de 1 000 Allemands tués, environ 1 500 prisonniers ; 12 chars, 12 canons, 190 véhicules détruits.

Dans la bataille de ce jour-là, toutes les unités de la DB ont leur part. Le GTL, dès l’aube, marche également vers Carrouges, longeant la forêt d’Ecouves au sud-ouest en deux colonnes sensiblement parallèles. A Cuissai, à moins de 5 kilomètres d’Alençon, le sous-groupement Minjonnet se heurte à une forte opposition. Pour s’emparer du village, il met en œuvre la manœuvre combinée maintenant parfaitement rodée des chars du 12e RCA et de l’infanterie du RMT. Plusieurs pièces antichars, une AM de l’adversaire sont mises hors de combat, des prisonniers sont faits tandis qu’à proximité les Thunderbolt de l’appui aérien écrasent une poignée de blindés allemands surpris à découvert
.

A Louguenoë, une dizaine de kilomètres plus loin, c’est une colonne ennemie, fuyant Cirai, attaquée par le GTD qui est deux par Pavant-garde de Minjonnet. La tête de la colonne disparaît dans la forêt d’Ecouves, le reste est pulvérisé par les canons du sous-groupement et les attaques aériennes.
Massu, qui a progressé à droite par Livaie et Rouperroux, rejoint Minjonnet sur les talons d’un gros détachement allemand auquel il tue 600 hommes et fait 130 prisonniers.

Devant Chahains où les 2 GT prennent contact, le combat est sévère. Le sous-lieutenant de Valence, officier de liaison du GTL, perd son bras gauche, coupé au ras de l’épaule par un obus de 88 tiré de tout près.
Au nord, sans préparation d’artillerie, Warabiot attaque Ecouché, coupant ainsi le chemin de repli de la 116e panzer. Les combats sont violents dans l’agglomération âprement disputée ; les Français l’emportent, plusieurs détachements ennemis sont détruits.

Les blindés du capitaine Branet, partis de Francheville, atteignent également Ecouché et participent activement à la mise à mort. Le reste du sous-groupement Putz et le sous-groupement Roumiantzoff se sont enfin rencontrés, dans la matinée, au cœur de la forêt d’Ecouves qui grouille d’ennemis. Son nettoyage nécessitera l’action de deux divisions d’infanterie américaine, la 79e et la 90e pendant plusieurs jours.
A la fin de cette journée du 13 août, pour la Division, quatrième jour de combats ininterrompus, 3 Panzer et diverses unités d’infanterie ennemis ont été bousculés, mis à mal. Le deuxième bureau confirme la proximité des Anglais à une vingtaine de kilomètres au nord, le seul cheminement de repli restant à la 7e armée passe entre Falaise et Argentan. Mais la situation est extrêmement confuse ; autour et au milieu de la DB, 15 000 hommes à peu près, grouillent plus de 20 000 Allemands.
Le groupement de Langlade est rassemblé en garde face à toutes les directions à Carrouges et à Ménil-Scelleur ; le groupement Warabiot occupe Ecouché et sa région immédiate avec pour mission d’interdire tous les mouvements venant de l’ouest. Roumiantzoff trépigne sur la N 158, stoppé en vue d’Argentan par l’interdiction américaine, et le tracé de la ligne de sécurité pour l’intervention aérienne. Leclerc a installé à Fleuré son PC avancé.
Le groupement tactique de Langlade reçoit à la nuit l’ordre de s’installer à Montmerrei, près de Mortrée. Si le sous-groupement Massu atteint sans difficulté son point de stationnement en contournant par le sud la forêt d’Ecouves, il n’en est pas le même pour le sous-groupement Minjonnet que les liaisons radio défectueuses coupent du reste de la DB toute la nuit.
Une première tentative de franchissement de la forêt par les chemins forestiers lui coûte un char, le second essai par la lisière nord de la forêt ne réussit que le 14 au matin.
Le 14 août est occupé par des accrochages sporadiques et la mauvaise humeur du général qui estime que les Américains perdent du temps ; la journée est également marquée par l’incursion de Roumiantzoff avec trois AM et une poignée de fantassins dans Argentan.
Les Calots rouges accrochent un drapeau tricolore au fronton de la mairie et se replient.
Les Américains hésitent, devant eux la forêt de Gouffern, les hauteurs entre Chambois et Trun, où se sont installés les Allemands, les impressionnent sans doute.
Pendant ce temps, les restes du groupe d’armées de von Kluge filent vers l’est.
Durant les trois jours suivants, les unités de la Division, réparties de Carrouges à Mortrée, tiennent solidement Ecouché et les abords immédiats d’Argentan au sud.
A l’entour de leurs positions, elles nettoient les villages, les fermes isolées, les bois où de nombreux éléments ennemis subsistent. Certains, épuisés, démoralisés, se rendent sans trop de difficultés, d’autres se battent désespérément.

Des nouvelles parviennent à la connaissance des soldats de Leclerc : l’armée d’Afrique a débarqué en Provence ; compromis dans l’attentat du 20 juillet, le général von Kluge qui commandait le front de Normandie s’est suicidé ; mais la relative proximité de Paris et la sensation exaltante d’une victoire en marche excitent davantage les esprits.
Les divisions américaines du Ve corps d’armée dont dépend la 2e DB poursuivent leur trop lente progression, ce qui laisse à l’adversaire un délai supplémentaire pendant lequel il poursuit son repli.

De son PC de Fleuré, le général Leclerc, impatient, est, comme ses hommes, obsédé par la perspective d’une chevauchée vers Paris, mais il doit obéir aux ordres du commandement allié. Tout en lui conseillant de ne pas s’engager trop profondément, il ordonne au colonel de Langlade de regrouper son groupement tactique à Médavy, de l’autre côté de la N 158. Les deux sous-groupements appuieront, en direction du nord, l’action menée par les 80e et 90e divisions US. Cette manœuvre doit permettre, en contournant Argentan par l’est, de rejoindre les Britanniques qui, eux, atteindront Trun à 12 km d’Argentan et ainsi fermer définitivement la poche de Falaise.

LA MISE A MORT. 18-20 AOÛT 1944.

L’attaque se déclenche le 18 août de part et d’autre de la forêt de Gouffern avec l’appui de toute l’artillerie de la DB et un très important appui aérien. Cependant, le lendemain, l’intervention de la 2e DB sur le terrain se révèle indispensable pour soutenir la 90e division. Vers 9 heures, les deux sous-groupements se mettent en route en direction d’Exmes.
Ormel est atteint avant la fin de la matinée, les Américains reprennent leur marche en avant. Les trois jours qui viennent de s’écouler ont permis aux Allemands de miner et piéger les itinéraires. L’aviation et l’artillerie alliées écrasent impitoyablement les débris de formations ennemies.
Au nord, les Polonais sont tout proches ; sporadiques, désespérées mais furieuses, les dernières contre-attaques adverses, parties des lisières de la forêt, échouent dans le sang.

Le 20 août, les hommes de Massu s’arrêtent à la cote 262, ceux de Minjonnet à Frénée, la bataille de Normandie est terminée pour la 2e DB.

Elle lui a coûté 133 tués, 648 blessés, 85 disparus, 76 engins blindés, 7 canons, 27 half-tracks et 133 véhicules détruits ;

devant elle, l’ennemi a eu 4 500 tués, 8 800 prisonniers, 117 chars, 79 canons, 750 véhicules.

Pendant dix jours particulièrement sanglants, la “furiafrancese” a pu se donner libre cours dans des combats incessants, mais, surtout, la cohésion des unités s’est faite, les principes d’emploi ont été vérifiés, codifiés, chacun a pris sa place dans ce dispositif compliqué, chacun a pris conscience de sa force, de l’efficacité de ses armes, mais aussi et surtout de l’indispensable fraternité des combattants.

 

Raymond MUELLE – LA 2ème D.B.

 

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