SCHNECKENBUSCH
SARREBOURG
Lundi 20 – Mardi 21 novembre 1944
SARREBOURG, 21 NOVEMBRE 1944
À l’aube du 20 novembre 1944, tout le groupement tactique Dio franchit le canal de la Marne au Rhin par le seul pont de Xouaxange, saisi intact dans la nuit par un groupement de la 44 e division d’infanterie US.
Les sous-groupements de Quilichini et Rouvillois réussissent à flanc-garder l’aile gauche américaine.
En fin de journée, Quilichini se heurte à quelques éléments retardateurs tandis que Rouvillois déborde sur la gauche la commune de Sarrebourg.
Le franchissement de la Sarre est rendu possible à Oberseltzel par le subterfuge d’un meunier qui a enivré l’équipe allemande chargée de sa destruction.
Dans l’après-midi du 21 novembre, le sous-groupement de Quilichini prend position à Sarrebourg, faubourg de France.
De durs combats sont livrés dans les quartiers de la ville.
Les derniers Allemands sont débusqués et faits prisonniers.
La 2 e DB déplore deux tués : Marcel Langlois 2e classe du RMT et José Caja du régiment blindé de fusiliers marins, tué d’une balle en pleine tête dans son tank-destroyer Dunkerque.
Après la libération de la ville, celle-ci sera occupée par un bataillon de la 44 e DI.US.
SCHNECKENBUSCH, 21 NOVEMBRE 1944
Le colonel de Langlade donne l’ordre au 1er Escadron du capitaine du Hays (12 e RCA), d’effectuer une reconnaissance sur l’itinéraire Nitting-Hesse-Schneckenbusch-Arzviller en avant-garde du sous-groupement Minjonnet pour se rapprocher de la ligne fortifiée allemande de la Vogesen Stellung et passer dans la vallée très étroite de la Zorn à Lutzelbourg, à l’est.
Renforcé d’une section de la 1re Compagnie du 13e Bataillon du Génie, l’escadron du Hays, parti de Niederhoff (d’où s’est retiré l’ennemi) avec le 3e Peloton de chars du lieutenant Canepa en tête, parvient à 9h35 à Hesse, avec les Américains.
Les ponts détruits par les Allemands sur le canal de la Marne au Rhin n’empêchent pas les soldats de la 2e DB d’atteindre Schneckenbusch à 9h45 ce 21 novembre 1944.
Libéré, le village est ensuite traversé par la 79e division d’infanterie américaine qui emprunte la rue principale et la rue de la Tuilerie.
Puis c’est l’objectif suivant : Niderviller, village germanisé et encore occupé par les Allemands.
La journée du 20 novembre va se révéler décisive.
Sur l’axe D, le plus au sud, Massu livre toute la nuit du 19 au 20 et la matinée du 20 un dur combat d’infanterie contre le barrage allemand qui interdit sa progression.
Il déploie largement toute l’infanterie donl il dispose dans les bois adjacents et il se fait solidement appuyer par l’artillerie.
Il réussit dans la matinée du 20 à faire tomber la résistance allemande débordée de pan et d’autre par ses fantassins.
Il atteint le pont sur la Sarre Blanche dont il s’empare, intact, sous le feu de l’artillerie allemande.
Les pertes en tués et prisonniers allemands sont considérables.
Lui-même subit des pertes notables.
Une fois de nombreux abattis déplacés et franchis, il trouve la route libre.
II rattrape une colonne allemande en retraite qu’il décime.
Toujours sous une affreuse pluie, mais aspiré par le vide de la route, Massu franchit le carrefour de Rehthal.
L’itinéraire de Dabo paraît, en fin de journée du 20, ouvert pour le lendemain.
Minjonnet, sur l’axe C, se heurte à de solides résistances à Niderhoff et à Voyer.
Il doit combattre durement pour les faire tomber.
Au nord, le GTD commence lui aussi le 20 son exploitation à partir du pont de Xouaxange conquis intact par la 44e DI US.
Le sous-groupement Quilichini bouscule les résistances rencontrées et atteint le soir Sarraliroff au nord de Sarrebourg.
Le sous-groupement Rouvillois fonce à partir de 14 heures droit au nord par des petits chemins; il détruit les résistances allemandes, fait des hécatombes et réussit à s’emparer à Oberstinzel du pont sur la Sarre au moment même où l’artificier allemand allait le faire sauter.
La progression reprend à allure de course.
Au soir le détachement de tête fait irruption et s’installe dans le gros bourg et carrefour routier de Rauwiller.
Toute la nuit des véhicules allemands, ignorant la présence française, viendront s’empiler, détruits, aux quatre entrées du village.
Le 20, à 16 heures, Leclerc donne l’ordre au GTV de s’engager sur la route de Dabo, derrière le sous-groupement Massu, de le prendre à ses ordres, de l’appuyer et de pousser au maximum sur l’axe D.
Le sous-groupement Minjonnet, arrêté devant Voyer, quittera l’axe C trop bien défendu, rejoindra l’axe D au carrefour de Rhethal et suivra lui aussi la route de Dabo.
Au GTD parti vers le nord, Leclerc fait parvenir seulement l’ordre suivant :
“Poussez le maximum de vos moyens sur l’axe qui devant vous cède. Passez les Vosges et rabattez-vous sur Saverne que je compte attaquer par le sud.”
Au groupement R renforcé d’un bataillon de la 79e DI qui serre derrière au plus près, il confie de garder les arrières de la route de Dabo.
Durant la nuit du 20 au 21, le GTV suit et rejoint tous phares allumés, par une nuit noire et une pluie dense, le sous-groupement Massu.
Le but de Leclerc est de faire passer au-delà des Vosges le maximum de moyens pour mener ensuite la bataille de Strasbourg; auparavant, attaquer Saverne par derrière, ouvrir le col avec les divisions d’infanterie du XV corps et s’assurer une ligne de communication et de renforcement indispensable pour aller sur Strasbourg.
La journée du 21 donnera, sur les itinéraires nord et sud, la possession de deux passages au travers des Vosges.
Au sud, Massu reprend sa progression sur Dabo qu’il dépasse vers 10 heures après un bref combat.
Il franchit le col du Valsberg (692 m) vers midi. Il débouche dans la plaine d’Alsace et remonte au nord en direction de Saverne jusqu’à Reinhardsmunster atteint avant la nuit.
Le GTV qui suit Massu s’étale sur les pentes des Vosges face à l’Alsace.
Au nord, le sous-groupement Quilichini est arrêté, comme prévu par Leclerc, par une solide défense allemande devant Phalsbourg.
Pendant ce temps, Rouvillois reprend sa progression.
Il livre un dur combat à Schalbach.
Il décide de quitter son axe et de déborder largement au nord, par le col de la Petite Pierre qu’il connaît bien pour avoir été en garnison en Alsace avant la guerre.
Il utilise ainsi à plein la liberté d’initiative donnée par Leclerc dans son ordre d’opération.
Bousculant des résistances allemandes surprises à Siewiller et Ottwiller, il atteint vers 16 heures les abords de la Petite Pierre.
Il y rencontre une solide résistance.
Le détachement de tête appuyé par un tir fusant haut réussit à prendre la Petite Pierre à la nuit tombante alors qu’il est à deux doigts de tomber en panne de carburant, n’ayant pu être ravitaillé depuis le franchissement du canal de la Marne au Rhin.
Des centaines de prisonniers sont faits dans la citadelle de la Petite Pierre.
Le sous-groupement Didelot serre derrière le sous-groupement Rouvîllois dans une région qui fourmille d’Allemands surpris.
Pour la journée du 22, l’intention de Leclerc est d’attaquer par l’est la trouée de Saverne et de faire tomber les défenses de Phalsbourg en les prenant à revers.
Le GTL, avec ses deux sous-groupements Mînjonnet et Massu, monte vers Saverne par deux itinéraires parallèles sur les pentes est des Vosges. Minjonnet atteint les abords sud-ouest de Saverne vers 13 heures et prend aussitôt la route de Phalsbourg.
Il livre un dur combat devant Quatre-Vents jusqu’à la nuit.
La liaison avec la 44e DI US venant de Phalsbourg sera prise le 23 novembre à l’aube.
Le col est ouvert à la circulation alliée.
Le sous-groupement Massu descend sur l’est de Saverne : il est vers 14 heures au carrefour de la Faisanderie, à 5 km est de Saverne.
Il y fait sa jonction avec les éléments de tête du sous-groupement Rouvillois venant du col de la Petite Pierre.
On croirait le rendez-vous Massu-Rouvillois derrière Saverne prévu au chronomètre.
En effet, dès l’aube, Rouvillois a dévalé à vive allure les pentes est des Vosges.
Il atteint sans difficulté dans un paysage grandiose, enfin sans pluie, Weiterswiller.
Il se rabat alors droit au sud et rencontre au village suivant, Neuwiller, une résistance solide à base de 88.
Il la bouscule à coups de mortiers et la déborde largement par Bouxwiller.
La progression est rapidement reprise en direction de Steînbourg et du carrefour à 5 km est de Saverne, sur la route de Brumath et Strasbourg.
Pendant que Massu nettoie Saverne et y fait de nombreux prisonniers, Rouvillois pousse ses éléments de tête sur la route conduisant à Brumath et Strasbourg jusqu’à Wilwisheim à 15 km est de Saverne.
Ainsi le 22 au soir, le col de Saverne est prêt d’être rouvert à la circulation et cinq sous-groupements de la division sont étages sur les pentes orientales des Vosges, face à la basse Alsace.
J.M.O. – 12e Régiment de Cuirassiers
RÔLE DU 2ème ESCADRON DANS LA BATAILLE DES VOSGES ET DE STRASBOURG
(Extrait)
Le pont de Xouaxange a été trouvé libre et non détruit en fin de matinée.
Le Sous-Groupement QUILICHINI en a aussitôt commencé le franchissement en direction de Beling.
À midi, le Sous-Groupement ROUVILLOIS commence également le passage. Le Colonel ROUVILLOIS donne ordre au détachement COMPAGNON, de partir sur Homing, devant lequel les américains sont encore arrêtés, et de reprendre là, son axe Barchain – Kerprich – Langatte – Haut Clocher – Delving – Ubergestigel ; il retrouvera probablement des éléments dans Haut Clocher, venus de Bobling.
Le reste du sous-groupement suit le détachement, débouche aussitôt en direction de Heming en longeant la voie ferrée, avec quelques difficultés en raison de l’inondation.
À l’arrivée au carrefour de Heming, le char SOISSONS II, récemment perçu en très mauvais état mécanique, tombe en panne. Le Peloton PERRIER se trouve réduit à trois chars.
Le char PARIS II (Chef De CARGOUET) passe char de tête.
Aussitôt après le nettoyage de la partie Est de Heming où il fait quelques prisonniers, pour gagner du temps le détachement ne reconnaît pas Heming, parce que l’on voit les américains franchir par la station Marchin qui est trouvée vidée. Le château d’Aberville est reconnu par la patrouille de tête (Aspirant AZINIÈRES, chars FYE et PARIS II).
Le détachement reprend la progression, il est accueilli par un feu d’ artillerie, de mortiers, au débouché du Bois de Noussard, sur Kerprich aux Bois.
Le détachement s’empare rapidement du village, le nettoyage rapidement mené et achevé par la patrouille de queue, permet de faire une trentaine de prisonniers, avec un oberfeldwebel, qui servaient deux mortiers de 81 et des armes automatiques.
Avant la fin même du nettoyage, la progression reprend en direction de Langatte en dépit de quelques obus reçus au débouché du village et vers la 294.
À l’entrée dans Langatte, la patrouille de tête surprend, en plein mouvement sur la route, une batterie hippomobile allemande de 150, ainsi qu’un convoi hippomobile. Le tout est mis en déroute et les servants tentent de s’enfuir à pied vers le bois à 1500 m au Nord.
Par dessus le village et la vallée, la patrouille de queue les mitraille et les tire à obus explosifs ; quelques allemands tentent de se défendre dans le village dont un nettoyage un peu plus poussé devra être fait ; ce sera la mission du peloton de mortiers et de la patrouille de queue, alors que la tête du détachement reprendra la progression.
Juste à ce moment une mitrailleuse allemande se met à tirer d’ une maison près du carrefour central du village. Le nettoyage permet de mettre la main sur une soixantaine de prisonniers laissés à la garde de quelques cuirassiers du peloton de mortiers et, surtout, un nombreux matériel :
– 4 pièces de la batterie d’ artillerie
– 4 mortiers en position dans la partie Ouest du village
– nombreuses voitures et chevaux.
Le détachement repart, tirant comme au lapin sur les allemands fuyant de Langatte et de Haut Clocher vers le Lekwald et le Beiwald. Le détachement entre par l’Ouest dans Haut Clocher en même temps qu’arrive du Sud, le détachement BRIOT.
Un char commandé par le maréchal des logis BIDAUD, et axé vers le bois au Nord de Haut Clocher, stoppe une colonne d’artillerie lourde et fait 20 prisonniers, tandis que le S/Lieutenant COQUELET nettoie le reste du village.
Un prisonnier est fait dans un dépôt d’essence allemand qu’il devait détruire. Le détachement reprend sa marche des l’arrivée des américains, qui prennent à leur compte les prisonniers.
Le Colonel ROUVILLOIS donne l’ordre au détachement COMPAGNON de foncer immédiatement sur Dolving et de s’emparer à tout prix par surprise du pont sur la Sarre d’Oberstinzel, puis de s’emparer ensuite, si on en a le temps avant la fin du jour, du carrefour de Rauwillers. Le détachement LENOIR suit immédiatement, il est 15H00.
Dolving est atteint sans encombre et le village reconnu est nettoyé rapidement, une dizaine de prisonniers. Le détachement se présente alors devant la Sarre, au Moulin de Sarreck. Le pont n’est pas sauté, le Lieutenant LUCCHESI avec une patrouille à pied, va immédiatement reconnaître le village de Oberstinzel.
Pendant que le groupement du Génie du détachement LENOIR reconnaît le pont et coupe sa mise à feu, le pont est franchi sans encombre et Oberstinzel traversé, est salué par un grand enthousiasme par la population. Quelques prisonniers.
La marche reprend rapide en direction de Hellerig où est mis en déroute un convoi hippo allemand marchant tranquillement sur la route en direction de Rauwillers. Pendant que les éléments de tête du détachement (patrouilles AZINIÈRES et PERRIER, section LUCCHESI) nettoient le village et dégagent la route des nombreux véhicules qui l’encombrent, le peloton de mortiers LECORNU et la patrouille de queue BALLESTER, mitraillent les fuyards allemands courant vers Geberval ; il y a une quarantaine de prisonniers dont un officier.
La progression reprend sur Rauwillers, par le chemin de terre Geberval, ce dernier est très encombré de véhicules hippo et auto qui ralentissent la marche et obligent à quitter la piste, aussi quelques H.T. s’embourbent.
Les éléments de tête se présentent devant Rauwillers (S/Lieutenant PERRIER et Lieutenant LUCCHESI), alors que le détachement est coupé derrière le char du capitaine par H.T. du Génie embourbé à 1200m. d’Hellering, Rauwillers est cependant occupé.
Une mésaventure manque de se produire : le feu ayant été ouvert entre les éléments de queue du détachement COMPAGNON débouchant de Geberval dans la demi-obscurité et les éléments de tête du détachement LENOIR (passés par Kirrberg). Ce feu est heureusement immédiatement arrêté grâce à la liaison rapidement prise entre les deux détachements.
À Rauwillers, les allemands sont complètement surpris. Les deux chefs de détachement décident l’occupation du village pour la nuit : issues Est et Sud au détachement COMPAGNON, issues Ouest et Nord au détachement LENOIR. Le Colonel ROUVILLOIS arrive immédiatement.
Dans l’obscurité, de nombreux allemands surpris sont faits prisonniers, toute la soirée et toute la nuit des voitures allemandes viendront se faire démolir sur les bouchons placés aux issues. Les allemands ignorent la main mise par nous sur ce carrefour important, à la tombée du jour, ainsi que notre passage de la Sarre.
L’organisation du détachement COMPAGNON est la suivante :
– carrefour Est : Peloton PERRIER et Section LUCCHESI,
– carrefour Sud : char 105 du Peloton PERRIER, Peloton mortiers LECORNU.
Celle du détachement LENOIR est la suivante :
– patrouille OLLERO sur la route de Hirschland,
– patrouille SALAUN sur la route de Kirrberg.
Le détachement BRIOT, après avoir occupé et nettoyé Haut Clocher, tient le passage de Dolving. La nuit est assez calme. Il faut signaler quelques coups de téléphone provenant des postes allemands de la région, ignorants que nous sommes à Rauwillers et la prise de quelques voitures allemandes, en particulier à 23H00, une jeep américaine occupée par deux allemands venant de Kirrberg est arrêtée dans le village (parce qu’elle marche tous feux allumés) par l’Aspirant AZINIERES.Le Colonel, pensant le passage prévu des Vosges par Zinsel solidement tenu, prévoit de pousser, le lendemain matin à l’aube, un élément au carrefour de Siewiller et des reconnaissances à Lhor et Bust, en vue éventuellement, de tenter le passage par La Petite Pierre.
Le détachement LENOIR, augmenté du 105 BESNIER, prélevé sur le détachement COMPAGNON, partira en tête pour permettre au détachement COMPAGNON de faire le ravitaillement nécessaire, munitions surtout.
Le bilan de la journée pour l’escadron s’établit par la seule perte de la jeep ORGEIX par l’artillerie à Kirrberg et par la capture pour l’ensemble du sous-groupement de 300 prisonniers, de nombreux véhicules et de pièces d’artillerie, particulièrement à Langatte et Haut Clocher.
La Sarre a été franchie par un pont qui permettra le lendemain le passage de tout le G.T.D. Le premier village alsacien “Rauwillers“ est libre.
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