ANTONY (Hauts-de-Seine)


ANTONY

Km=556

Jeudi 24 août 1944

 

ANTONY, 24 AOÛT 1944

 

Antony et la Croix de Berny, couverts par des canons antichars, sont de sérieux môles de résistance allemands.

Il est 10h, le sous-groupement Putz entre dans Antony et doit progresser dans un labyrinthe de rues.
Guidés par les résistants d’Édouard Bolis, chef du Mouvement de Libération nationale, les soldats sont durement accrochés et gênés par les vagues d’habitants en liesse.

Pour faire sauter le dernier verrou allemand à la Croix de Berny, les chars du capitaine de Witasse du 501 e RCC déclenchent un déluge de feu.

Arrive alors le capitaine Dronne du RMT.
Leclerc, qui fulmine à cause de ce vaste embouteillage, lui ordonne : « filez sur Paris, passez n’importe où, mais entrez à Paris ce soir, il le faut pour le moral de la population et de la Résistance ».

Le détachement léger se glisse à travers la banlieue et parvient à l’Hôtel de Ville. Durant ces combats, la 2e  DB déplore 4 tués.

Le 6 décembre 1947, le président de la République Vincent Auriol vient saluer à Antony l’arrivée du convoi funéraire du général Leclerc qui va recevoir les honneurs nationaux dans Paris.

Source : Le Guide Vert Voie de la 2e DB

 

Scènes de la Libération d’Antony

 

 

 

 

 

ANTONY LIBÉRÉ

Ce jeudi 24 août, en fin de matinée, la population entend les roulements de chars portant la Croix-de-Lorraine. Ce sont les Leclerc, des libérateurs français ! Ils pénètrent dans Antony par le sud, une colonne venant par la N20, l’autre par l’ancienne route de Chartres. Des tirs de rafales balaient les rues qui deviennent désertes. Mais la ville est rapidement libérée… à moitié toutefois, les soldats restant bloqués au niveau de la rue Auguste Mounié.

Un 88 fait barrage

Place Croix-de-Berny, noeud routier stratégique, les Allemands ont installé un canon ravageur sur les blindés – un antiaérien de 88 – pointé sur la nationale. Au bout de plusieurs heures, décision est prise de le neutraliser par une manoeuvre de flanc. Le capitaine Witasse et ses hommes sont guidés par des résistants antoniens parfaits connaisseurs du terrain, dont le policier Gaudry. Ils empruntent la rue Velpeau et remontent par l’ex-RN 186. Là, le char Sherman anéantit le canon 88 autour de 18 heures. De l’autre côté de la Croix-de-Berny, des résistants pénètrent dans le stade de l’US Métro et coupent les liaisons entre les Allemands quittant la Croix-de-Berny et ceux retranchés dans la prison de Fresnes.

L’appui des résistants locaux

Le verrou de la Croix-de-Berny a sauté. Mais à l’entrée de Bourg-la-Reine, un autre canon 88 allemand détruit un char avant d’être mis hors d’état de nuire. Il est 19 h 30 quand le général Leclerc renonce à atteindre la capitale par la N20, itinéraire trop dangereux. Depuis l’actuelle rue Jean Moulin, il ordonne au capitaine Dronne de foncer vers Paris en passant « par où vous voudrez ». Ce sera par l’Haÿ-les-Roses. 150 hommes de la 2e DB atteindront la place de l‘Hôtel de ville à Paris vers 21 h 30… Pendant ce temps, à Antony, soldats et habitants partagent la liberté recouvrée. Non sans morts. Trois hommes de la 2e DB sont tombés dans la ville. Les combats ont fait huit morts et quarante-deux blessés dans la population. L’aide de la résistance locale, conduite par Henri Lasson, aura été fort précieuse. Les résistants auront fait quelque 70 prisonniers durant cette journée. La stèle du souvenir inaugurée cet été au carrefour de la Croix-de-Berny, qui porte désormais le nom de place du Général De Gaulle, est un hommage à tous ces combattants de la liberté.

(Source : Ville d’Antony)

 

 
 

 

24 août 1944
journée mémorable pour la 2/501e RCC

Par Jacques de WITASSE

 

La veille, la compagnie avait exécuté, par une chaleur accablante, une épuisante étape d’environ deux cent cinquante kilomètres. Le caoutchouc des patins avait fondu en partie. Harassée, la compagnie était parvenue, la nuit tombée, aux environs de Limours, les réservoirs vides et les liaisons perdues. Une pluie battante, orageuse, s’était mise à tomber, et le capitaine se faisait beaucoup de souci.
Cette chevauchée vers la capitale, commencée dans l’enthousiasme, se terminait dans l’appréhension.
Le 24 août, à l’aube, le capitaine se met à la recherche d’ordres. Rencontrant le commandant Putz. celui-ci lui apprend que sa 2e compagnie se trouve, justement, sous ses ordres.
Le soleil se lève, les ravitaillements en carburant arrivent, sans que personne ne se doute du véritable tour de force accompli par le 4e Bureau. Bien que la nuit ait été fort loin d’être réparatrice, l’ambiance est joyeuse. Décidément, ce 24 août s’annonce sous les plus heureux auspices.
Première destination : Arpajon, puis conversion vers le Nord, en direction de Sceaux. A Ballainvilliers, petits accrochages, vite réglés.
Maintenant, La Bourdonnaye marche en tête, avec sa 3e section de chars. A la sortie de Longjumeau, diverses armes se dévoilent. Parmentier sur son Eylau, fait merveille et à lui seul, détruit trois canons de 88 sans avoir été atteint. C’est un exploit !
La section de commandement, en traversant Longjumeau, subit un violent tir de mortiers et un obus tombe sur la caisse de YAusterlitz, tuant le pilote Le Saout, et l’aide-pilote Guinlat.
Lacoste passe en tête du dispositif avec sa 2e section, car La Bourdonnaye commence déjà à se trouver à court de munitions ; ça tire beaucoup et de partout.
A Wissous, intervient un curieux incident : l’Ulm de Raveleau voit arriver sur lui un engin étrange, une sorte de char lilliputien, d’environ trente centimètres de haut, et qui se dirige sur lui en cahotant d’une manière assez grotesque. Naturellement, cet engin est rapidement neutralisé par le tireur Huguet. On apprendra plus tard qu’il s’agit d’une invention malfaisante des nazis, une maquette de char, bourrée d’explosifs et qui, télécommandée, devait exploser sous l’Ulm.


“Goliath” anti-chars Allemand télécommandé

 

Lacoste fait une quinzaine de prisonniers, tandis que Michard, avec sa 1ère section de chars, s’affaire sur la gauche et détecte à mille cinq cents mètres environ, au Sud d’Antony, toute une batterie de canons sur laquelle il ouvre aussitôt le feu, déclenchant un véritable feu d’artifice.
Les prisonniers que nous faisons provoquent notre étonnement. Revêtus de tenues de couleur sable et coiffés de casquettes à longues visières, de couleur sable également, nous les prenons initialement pour des membres de l’Afrika Korps. Il n’en est rien, évidemment, ce sont simplement des soldats allemands qui étaient incarcérés à la prison de Fresnes et élargis pour prendre part à la défense de « gross-Paris ».
Revenant sur l’axe principal, la route nationale, Lacoste qui est décidément bien mis à contribution ce jour-là, bute, à l’entrée Sud d’Antony, sur un obstacle qui, cette fois, semble difficile à surmonter. Son char de tête, le Bautzen échappe de justesse à un obus de 88 qui, par bonheur, ne fait que lui érafler le museau.

Ce 88 est embossé à près de deux mille mètres de là, au carrefour de la Croix de Berny. Lacoste en rend compte aussitôt au capitaine, qui d’ailleurs se trouve à proximité. Il va falloir manœuvrer, mais par où ? Par la droite ? Par la gauche ? Un Antonien résout le problème ; le garde champêtre, se souvient Lacoste, se propose de nous guider. Il monte sur la Jeep du capitaine qui est accompagnée du Friedland de Lacoste et de deux autres chars de sa section, ainsi que d’un détachement du génie : deux escouades des sergents Alcan et Morel, de la première section de la 3e compagnie du 13e bataillon du Génie, tandis que le reste de la section Bidaut flanque, en agissant comme infanterie, la progression des chars Lacoste. Il est juste de souligner que la section Cancel sera, elle aussi, à l’honneur, en accompagnant un peu plus tard Dronne et Michard, tandis que la 3e section du Génie, sous-lieutenant Desjardin, se bat devant la prison de Fresnes où sera tué l’admirable capitaine Dupont.
Une prudente reconnaissance à pied nous confirme que le 88 est bien là, à la Croix de Berny. Doucement le Friedland avance, « à pas feutrés » pourrait-on dire, le tireur Okretic pointe son canon sur l’arête du mur qui le protège des vues du 88. D’un seul coup, le pilote, Hervé, accélère et le capitaine, à pied, aperçoit les servants du 88, qui, surpris, manœuvrent à toute vitesse les volants de pointage pour orienter le tube contre le char qui vient de se dévoiler. Trop tard, deux obus, pas davantage, et le 88 a vécu, les ressorts récupérateurs giclent vers le ciel et tout est réglé.
Les survivants sont neutralisés par le Génie et le capitaine rend compte. Alors, le carrefour étant libéré, la progression peut reprendre. Il donne en conséquence l’ordre à Michard, qui est resté en 2e échelon, de prendre la tête. Mais Michard ne répond pas et c’est incompréhensible.

Le commandant Putz avertit le capitaine que, durant notre action sur la Croix de Berny, le général Leclerc est arrivé.
S’emportant en voyant tout le G.T.V. stoppé, il a interpellé Dronne et lui a enjoint en contournant les résistances ennemies, de pénétrer au cœur de Paris sans se laisser accrocher.
Pour le soutenir, il lui donne la lrc section de chars de Michard et la section Cancel du Génie, qui sont là à proximité.
Pineau, avec son camion de carburant, est arrivé à temps pour faire les pleins.
Dronne, Michard et Cancel ont démarré immédiatement. Difficile d’imaginer la déception du capitaine qui se voit privé de sa première section, soigneusement gardée en réserve pour le dernier coup de boutoir !
Alors, c’est La Bourdonnaye qui, avec sa 3e section, va progresser en tête vers Bourg-la-Reine. L’Elchingen II avance, soutenu par l’Eylau de Parmentier, tandis que La Bourdonnaye, à pied, surveille l’engagement de ses chars de tête. L’Elchingen fait à peine quelques centaines de mètres qu’il est touché à mort par un nouveau 88 Flak que Parmentier détruit presque immédiatement. L’aide-pilote Geronimi est mortellement blessé et deux membres de l’équipage du char, blessés.
En principe, nous pourrions continuer à progresser, mais il commence à se faire tard, la nuit tombe et les hommes eux aussi, tombent de fatigue, et l’ordre arrive de se regrouper autour de la Croix de Berny pour y passer la nuit. Tout le monde est soulagé sauf Parmentier et La Bourdonnaye.
De l’avant, ils sont persuadés que vient de sauter le dernier obstacle qui s’oppose à la poursuite de la marche et à l’entrée dans Paris, mais l’ordre est formel. Désespéré, Parmentier fera la confidence plus tard qu’il a l’impression d’avoir raté l’affaire de sa vie : l’entrée en tête dans la capitale. Il ignorait que cette gloire serait réservée à Caron et à Michard avec notre 1èrc section.
La nuit est maintenant totale. Chacun s’organise comme il peut, dormant parfois directement sur le sol. En voulant se garer, le Bautzen enfonce un mur d’enceinte.
Le capitaine se remémore les événements de la journée. Tout à coup lui vient l’idée de tenter d’établir une liaison radio avec Michard et il doit ouvrir le réseau. Stupéfaction ! Lointaine, assourdie, entrecoupée de longs silences, nous parvient la voix de Michard qui rend compte de sa progression. Émus, haletants presque, nous l’écoutons en silence. A un certain moment, Michard élève son micro très au-dessus de la tourelle de son Montmirail et nous entendons — instant prodigieux, inoubliable… — les cloches de Notre-Dame sonner en l’honneur des nôtres arrivant dans Paris. Immédiatement sont oubliées des années d’angoisses, de malheurs, de doute, de dangers volontairement courus. Le rêve qui nous soutenait se réalise et Michard y a participé.

Oui, la journée du 24 août 1944 fut inoubliable. Nous aurons connu là un instant prodigieux qui, dorénavant, illuminera nos existences.
Le général de Witasse évadé d’un oflag , rejoint Alger en 1943 et prend, comme capitaine le commandement de la 2′ compagnie de chars du 501ème RCC.

Paru dans Caravane, n° 73 , 4ème trim. 1991.

 

 

 

 

EMPLACEMENT de la BORNE

La borne se trouve au carrefour des avenues de la Division-Leclerc et Rabelais.